Enquête de sens La cartographie des savoirs

21avr/103

De la cartographie géographique à la cartographie sémantique

Que ce soit de simples parcelles de terre, un pays ou un continent, l’homme a toujours eu besoin de gérer des territoires. Pour l’aider, il a inventé la cartographie. Elle lui permet de construire des cartes et ainsi d’appréhender plus facilement chacun de ses espaces.

La plus ancienne carte que l´on ait retrouvée jusqu´à présent, est cette tablette babylonienne appelée "Carte babylonienne du monde"

Au fil des siècles, la cartographie a perfectionné ses techniques et augmenté son champ d’application. À l’origine, la carte servait d’aide-mémoire en représentant graphiquement des éléments constitutifs d’un territoire limité (la cartographie antique). Ensuite, elle est devenue descriptive avec la couverture de l’ensemble du globe (la cartographie topographique).

Carte de Cassini (source IGN)

Puis, elle est devenue thématique en représentant des données de plus en plus « abstraites » (la cartographie thématique).

"Si ardu étant ce chemin qu’il serait difficile de le donner à entendre par des paroles ou de l’écrire avec la plume. La meilleure explication qu’ait trouvé pour cela le génie des hommes est de le donner en peinture sur une carte."

Martin Cortès

La « Carte figurative des pertes successives en hommes de l’Armée française dans la campagne de Russie de 1812-1813 » est un des meilleurs exemples de carte thématique. Elle a été décrite comme étant « le meilleur graphique jamais produit » (Tufte, 1986) , un de ceux qui semblent « défier la plume de l’historien par sa brutale éloquence » (Marey, 1878). Elle représente le parcours des troupes de Napoléon (données géographiques) ainsi que leur importance (données quantitatives)."

D’un point de vue général, la cartographie correspond à l’ensemble des études et des techniques qui permettent de construire une carte à partir d’informations. La carte est alors constituée de représentations graphiques de phénomènes (concrets ou abstraits) en positions relatives, localisables dans l’espace [Bertin, 1977; Bertin, 1999 (1re éd. 1969)]. Cette opération de construction est menée par un cartographe. Il arrive que la carte soit utilisée comme méthode de recherche lorsqu’elle apporte elle‑même une information nouvelle non encore prévue ou pressentie par son utilisateur. La carte devient alors un instrument de transmission de messages mais aussi un instrument de résolution [Poidevin, 1999].

« [Ce livre] aborde une problématique à laquelle sont confrontés quotidiennement beaucoup de professionnels : celle de comprendre et de gérer leurs territoires grâce à la cartographie.
L’enjeu est grand : meilleurs seront les documents cartographiques, plus sûres seront les décisions qui en émanent. »

Didier Poidevin

De nos jours, les organisations rencontrent la même problématique, mais avec des territoires de nature différente. Elles doivent gérer leur patrimoine intellectuel c'est-à-dire leurs connaissances explicites (les documents, projets, retours d’expériences, etc.) et leurs connaissances tacites (les expériences, le savoir-faire, etc.).

[La gestion des connaissances consiste à] « localiser et rendre visible les connaissances de l’entreprise, être capable de les conserver, y accéder et les actualiser, savoir comment les diffuser et mieux les utiliser, les mettre en synergie et les valoriser ».

Grundstein Michel

Pour répondre à cette problématique de gestion de territoires, nous proposons une nouvelle cartographie appliquée aux organisations : la cartographie sémantique.

La cartographie au service des organisations

Les organisations sont de plus en plus submergées par le nombre toujours croissant d’informations qu’il est nécessaire de maîtriser pour mener à bien leurs activités. En effet, étant obligées de faire face à la mondialisation des flux et des services, elles perçoivent de plus en plus que la maîtrise des informations constitue le nouvel enjeu à relever. Les organisations découvrent alors de nouveaux besoins et développent rapidement de nouvelles activités : veille stratégique, gestion de l’innovation, capitalisation des savoirs, gestion du capital intellectuel et humain, intelligence économique, etc.

Maîtriser ses informations devient alors le challenge incontournable auquel doit faire face toute organisation indépendamment de sa taille. La conséquence directe est un accroissement permanent de la quantité d’information à manipuler.

Nous nommons « espace informationnel » l’ensemble des informations manipulées par une organisation. Pour chaque organisation, cet espace est très vaste. Il va des informations collectées (comme les informations sur les collaborateurs, les clients, les fournisseurs, les partenaires, les concurrents, les marchés, etc.) aux savoir-faire (comme les descriptions des outils et des procédés, la documentation scientifique et technique, les brevets, etc.).

Face à des espaces informationnels toujours plus importants, comment gérer toutes ces informations ? Comment faire face à autant de données ? Comment maîtriser un espace informationnel ? Ces préoccupations constituent la problématique à l’origine de ce travail.

Notre approche : cartographier pour maîtriser

« Devant la masse toujours croissante des données, la cartographie offre des possibilités de communiquer synthétiquement et dégager les informations stratégiques utiles aux décideurs. Seulement, comment passer des données brutes à la carte ? »

Pierre Mongin (préface de[Poidevin, 1999])

« Une image vaut mille mots ». Cette constatation sur la valeur de la visualisation est d’autant plus vraie si l’on travaille avec un grand nombre d’informations. La synthèse des travaux sur la cartographie (géographique) et sur la visualisation permet de considérer les cartes comme un médium idéal entre un grand nombre d’informations et l’esprit. Chaque carte joue alors le rôle de support externe de la pensée pour amplifier la cognition de ses utilisateurs.

Carte réalisée dans le cadre de nos travaux de thèse sur la cartographie sémantique (www.knowledge-mapping.net)

Notre approche consiste à appliquer les différents paradigmes de la cartographie aux informations manipulées par les organisations pour construire des cartes dites « sémantiques ».

Commentaires (3) Trackbacks (3)
  1. Excellent ! Faire « passer » ça (les idées, les faits) dans une émission Web TV « carto » :-)

  2. Bonjour,

    en charge de l’animation et de l’édition du site http://owni.fr, je me demandais si il serait possible de reprendre votre article sur notre plateforme.

    Merci d’avance pour votre réponse :)

  3. Avec plaisir du moment que vous citez la source avec un lien.

    Bien cordialement


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